Il en est des Méthodes, il en est des Maîtres, il en est surtout des modes…
À l’aube de ses 3 000 ans d’existence, les questions fondamentales de l’équitation occupent toujours les esprits, nourrissent discussions et querelles et plongent bon nombre de cavaliers en devenir dans le désarroi total.
Parmi la littérature équestre, certains y trouvent des bibles alors que d’autres n’y voient que théorie.
Entre les écuyers contemporains et anciens, on se dispute sur la position des mains, des encolures, la définition du contact, la réalité de l’incurvation du cheval, la légèreté : un objectif ? Une fin en soi ? Un moyen ? …
Et le matériel alors ? Filet, bride, licol, caveçon ? Mais quel mors : simple, double, acier, cuivre, résine ? Et la selle ? Avec ou sans arçon ? Cuir ou synthétique ?
Et pour quel cheval ? Quel âge a-t-il ? Comment est-il fait le bougre ? Et surtout à quoi pense-t-il ?
Mais d’abord, quelles disciplines ? Compét ou pas compét ?
En plus de cela, comme si ça ne suffisait pas, viennent s’ajouter les connaissances scientifiques en termes de biomécanique, de théories de l’apprentissage, d’éthologie équine…
Aujourd’hui, on trouve tous les cocktails possibles pour répondre à toutes les questions. Du moment qu’il est mentionné quelque part les mots magiques « légèreté », « biomécanique », « éthologie »… Bingo !
Mais au final, qu’en est-il réellement des questions fondamentales ?
Tourner en rêne d’ouverture ? En rêne d’appui ? Avec le dos ? L’assiette ? Se pencher ou ne pas se pencher ? D’un moniteur à l’autre, d’un livre à l’autre, il vous est conseillé tout et son contraire en grand renfort d’analyses biomécaniques et de démonstrations.
Globalement, tout pourrait être valable mais chaque chose répond en fait à une problématique précise.
Si le débutant est perdu et ne sait plus qui croire, il faut surtout qu’il comprenne que toutes ces façons différentes d’aborder les choses sont complémentaires et utiles à apprendre. Pour prétendre être un cavalier accompli, il faut apprendre à utiliser le plus de techniques possibles ou, en tout cas, disposer d’un éventail technique varié pour une même action. Car en fonction de l’âge du cheval, de son niveau de travail, de sa morphologie, de l’exercice abordé, du contexte… l’une ou l’autre technique sera à privilégier. Donc, dans sa phase d’apprentissage, le cavalier ne doit pas se torturer l’esprit à choisir entre telle ou telle paroisse, il doit juste être perméable à tout, absorber le plus de choses possibles en se torturant plutôt l’esprit à comprendre les différents effets qui aboutissent, à priori, au même résultat.
Même résultat ? A priori…
Par la suite, le cavalier, en expérimentant ses différentes méthodes, va comprendre que si l’apparence fait croire à un même résultat, les conséquences de chaque choix technique engendrent en fait des mécanismes différents chez le cheval, tant sur le plan de la construction physique, que du développement relationnel et des capacités d’apprentissage.
Son œil et son tact s’affinant, il va ressentir aussi concrètement que son cheval ne produit pas les mêmes efforts, que le geste obtenu n’est pas de même qualité et que dans la durée le cheval se construit différemment.
Les grands Maîtres sont uniques et leurs disciples, tout talentueux que certains puissent être, sont toujours de pâles imitateurs tant qu’ils ne coupent pas le cordon ! En chacun de ces Maîtres, il y des vérités que ne seront jamais que l’expression de leur personnalité unique et donc non transposables. En revanche, l’héritage culturel de leurs expériences livrées à la connaissance universelle nous permet de comprendre la richesse de l’art équestre, de chaque cheval et de chaque cavalier, et est une magnifique source d’inspiration.
Il n’y a rien de théorique dans tous ces livres, pas plus que de recette miracle. Il y a juste la volonté de livrer son expérience personnelle aux autres, de déposer une pierre sur l’édifice du savoir. Une pierre qui doit servir d’appui aux pierres voisines, de base aux pierres supérieures. Celui qui se contente de trimballer la pierre de l’autre ne fait pas beaucoup avancer le « schmilblick ».
Chacun d’entre nous est la synthèse unique de tous les savoirs qu’il accumule et des expériences qu’il vit. Le meilleur enseignant, le meilleur Maître, le meilleur de vos amis cavalier, est celui qui vous livre l’état actuelle de sa connaissance, vous invite humblement à tracer votre propre chemin et vous pousse à vous intéresser à d’autres que lui.
Maryan
Dresser, c’est ( entre autres ), comme le disait Steinbrecht, donner une gymnastique au corps du cheval.
Les différentes méthodes, si elles sont assez d’accord ( à minima ) sur le fait qu’il faut parvenir à un moment donné à relever le devant, et à un autre à faire fléchir le derrière, divergent sur le « quand et comment relever » et sur le « quand et comment faire fléchir ».
Suivre une méthode jusqu’à terminer le dressage d’un cheval au risque que ce soit « coûte que coûte » peut donner la satisfaction de maitriser la haute école, mais peut-être pas la conscience très tranquille.
Essayer toutes les méthodes en pensant toujours que c’est l’autre qui va nous permettre de résoudre un problème spécifique, c’est le risque de se perdre en route.
Comme disait Beudant : « regardez vos chevaux en liberté, ce sont eux qui vous diront que faire ».
Un article qui montre bien les difficultés auxquels font face les cavaliers choisissant de suivre, de découvrir des enseignements, écoles et approches différents (sois-dit en passant, je connais aussi des cavaliers qui ne prêcheront toujours que pour leur propre paroisse, fi des modes, méthodes et maîtres…).
La « solution » proposée est également des plus justes et censée: ouverture d’esprit, tact et réflexion. Il y a sans doute dans chaque « méthode » équestre des choses bonnes, et parfois moins bonnes: le tout pour le cavalier est de parvenir à retenir ce qui lui semble le plus en accord avec sa philosophie, et semble correspondre au cheval.
Il y a quelques années de cela, j’ai fait un stage d’initiation avec une monitrice de mon club à la « méthode blondeau » : quoique l’on en pense,que l’on aime ou rejette en bloc, j’ai le souvenir de chevaux plus décontractés, et surtout beaucoup plus à l’écoute, attentifs au cavalier dans le box grâce aux exercices demandés. Fini le cheval qui continue à brouter et vous présente sa croupe à l’entrée de son box et vous ignore complètement ! Nous sommes ensuite allées sur le terrain à côté du club et avons fait sauter un tronc et un fossé en main à un jeune franche-montagnes de 3 ans (après avoir vérifié la « marche avant » et le « frein » dans le manège, sur le plat puis sur des barres au sol) : tout s’est très bien déroulé. C’était très instructif de faire sauter ainsi un cheval à pied à côté de soi.
Pour finir mon commentaire: j’étais la seule de tout le club à m’être inscrite à ce stage de découverte…D’autres sessions de travail à pied (et je ne parle pas uniquement de la « méthode blondeau ») ont eu lieu par la suite pendant les vacances: elles n’ont jamais vraiment trouvé beaucoup preneur, et sont même régulièrement annulées faute d’inscrits.